Prescription
Le délai de prescription pour les crimes envers des victimes adultes a été porté à 20 ans. Mais après ce délai, le meurtrier ou le violeur ne peut plus être poursuivi en justice et les victimes ne pourront plus déposer plainte… Cela s’appelle le droit à l’oubli !
Malgré tous nos efforts, le délai de prescription des crimes sexuels existe toujours. C’est une notion très française car dans d’autres pays, comme le Canada, la prescription n’existe pas. En France, si un crime sexuel n’est pas résolu 20 ans après les faits, le criminel n’a plus rien à craindre de la justice. Les victimes de viol ont souvent besoin de plusieurs années pour aller déposer plainte. L’état psychologique dans lequel elles se trouvent après l’agression, le sentiment de culpabilité, la honte leur enlèvent la force de se rendre au commissariat de Police ou à la Gendarmerie. Si après 20 ans (et après l’âge de 38 ans si elles étaient mineures au moment des faits) elles ont enfin le courage de dénoncer ce qu’elles ont subies, elles n’ont plus le droit de le faire !
Cette situation conduit à des aberrations et des injustices criantes. Une des victimes de Guy Georges n’a pu participer à son procès qu’à titre de témoin ! A l’heure de l’ADN, le droit à l’oubli pour un violeur ou un assassin est d’un autre âge.
Classement sans suite et correctionnalisation
Les enquêtes de victimation de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales montrent que chaque année plus de 75.000 femmes sont victimes de viols. Or, moins de 10.000 plaintes et moins de 1000 condamnations pour viols sont enregistrées. Cela montre d’une part que beaucoup de victimes n’osent pas porter plainte et d’autre part que la police et la justice considèrent trop souvent ces plaintes comme injustifiées. Des milliers de viols sont « requalifiés » en agressions sexuelles par les services de police ou la justice. Pourquoi ces qualifications faussées ? Parce que le viol dérange ; parce que le dossier est plus vite refermé ; parce qu’une comparution en correctionnelle est plus simple qu’un procès d’assises ! En 1992, Guy Georges n’a fait que deux ans de prison alors qu’il en aurait probablement fait cinq s’il avait été jugé aux assises. Pendant ces trois ans de « grâce », il a tué quatre jeunes femmes…
Il est indispensable de rendre justice aux victimes en reconnaissant la réalité du viol qui est pour elles une blessure dramatique.
Alliance entre la justice, la police et la médecine
Beaucoup de progrès ont été faits en dix ans. L’APACS à travers ses colloques a réunit ces trois différents milieux pour une meilleure compréhension. De nombreux commissariats sont maintenant équipés de psychologues pour accueillir les victimes, mais aussi les délinquants. Des formations sont dispensées à la police et la gendarmerie par des associations de victimes. Toutefois chaque interrogatoire est une souffrance. Certains juges d’instruction ont parfois une attitude qui fait penser à la victime qu’ils sont du côté du criminel. Déposer plainte, c’est exposer les faits dans leur cruauté, leur violence. Parler de ces faits, c’est les revivre. Plus d’interaction entre la police, la justice et les psychothérapeutes reste donc nécessaire.